Gérer la mort d’un proche parent
Ma grand-mère paternelle est décédée pendant la pandémie, en juillet 2021. Elle était dans une RI, une ressource intermédiaire, car elle avait de graves problèmes d’arthrose qui l’empêchait de se mouvoir. À part ça, elle était en pleine forme et à part quelques égarements – ce qui est parfaitement normal à l’âge de 94 ans! -, elle était parfaitement bien.
Lorsqu’elle est décédée, j’ai eu la chance de pouvoir être présente. Elle a fait une crise de foie, et des pierres se sont logées dans des artères qui apportent le sang au foie et à la vésicule biliaire. On m’a téléphoné une fois qu’elle était à l’hôpital, et j’ai pu m’y rendre afin qu’elle ne soit pas seule. J’étais à ses côtés quand elle est décédée, et c’était la seule promesse que je lui avait jamais faite. « Yaya (ça veut dire grand-maman en catalan), je sais que je ne viens pas te voir assez souvent, mais je serai toujours là quand tu auras besoin de moi ». J’ai tenue ma promesse.
J’étais sa seule famille au Canada. Mon grand-père est mort en 2004, et Yaya n’avait eu qu’un seul fils survivant. Étant fille unique moi-même, la famille était assez limitée mettons. Mon père a déménagé aux États-Unis en 1999, et venait une semaine par année visiter ma grand-mère. C’est à moi qu’incombait tout ce qui avait rapport à ma grand-mère : quand elle était hospitalisée lorsqu’elle tombait dans son appartement, pour faire les démarches pour qu’elle soit « placée », pour l’organisation des funérailles et tout le reste.
Et à ce jour, il me manquait une chose. Depuis qu’elle est décédée, je n’avais pas fait faire la démarche de recherche testamentaire, la dernière chose à faire lorsque quelqu’un décède. Elle nous avait légué son héritage deux ans avant son décès. Il n’y avait donc pas d’urgence. Sauf que la loi est la loi, et ça faisait près de deux ans que j’évitais cela. Pourquoi?
Des nuits blanches à me dire que je devais m’en occuper, que je devais fermer le dossier, faire les dernières démarches… J’en ai eu plusieurs. Farfouiller les boites de documents que je conserve précieusement afin de retrouver toutes les informations nécessaires…. ça me semblait trop. Surtout que même ses documents conservent encore son odeur, c’était beaucoup d’émotions à gérer, et j’essaie souvent d’éviter les émotions afin de ne pas m’en embarrasser.
Sauf qu’aujourd’hui, j’ai pris mon courage à deux mains, et j’ai fouillé et terminé de remplir les formulaires pour faire les recherches. C’est la dernière étape de mon deuil, un deuil que je range dans les mêmes boites que ses documents, bien à l’abris dans un garde-robe de mon appartement.
Avec les effluves de son parfum, j’ai rempli les questionnaires, envoyé mes demandes, et je me sens fière d’avoir enfin fait les démarches nécessaires. C’est comme si j’enlevais une tonne de briques que je portais sur mon dos depuis juillet 2021.
En même temps, mon coeur est brisé. C’est officiel maintenant : ma grand-mère, Yaya, ne me dira plus jamais que ça fait trop longtemps que je ne suis pas allé la voir. Elle ne m’appellera plus jamais tésoro (trésor en espagnol). Elle ne laissera plus de messages sur ma boite vocal qui débute par « Steffie ».
La vie est faite de peines et de joies. J’ai eu la chance d’avoir une grand-mère qui m’a vu grandir, qui m’a donné des conseils, qui a été présente toute ma vie. Elle a elle-même traversé plein de tragédies, comme la mort de ses jumeaux, la mort de son conjoint. Elle a laissé tous ses frères et soeurs pour suivre son mari au Canada. Et à travers tout ça, elle était une femme tellement forte, tellement fière. Elle m’a tellement donné. J’ai eu la chance de lui dire au revoir, et aujourd’hui, je lui dit au revoir une dernière fois. Elle sera toujours dans mes pensées, c’est clair.
Avez-vous perdu des gens proches de vous? Comment vivez-vous votre deuil?